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mercredi 20 août 2014

V-10) Gestaltisme versus Connexionnisme et cognitivisme


Le cognitivisme prône le fonctionnement « computationnel » du cerveau et des mécanismes biologiques en général. Il considère que le vivant, tel un ordinateur, manipule des symboles élémentaires à travers un programme (implicitement pensé comme écrit à l’avance). Cette manipulation de symboles trouve leur correspondance dans le monde réel, la « computation » permettant d’arriver à un résultat lui-même composé de symboles. Le cognitivisme a donc besoin de l’idéalisme et du réalisme, le monde des idées correspondant au monde réel, les symboles aux idées. Ainsi la compréhension du monde se résume à « comprendre » (la computation) les symboles en les manipulant, en leur appliquant des règles prédéfinies, en les réordonnant, etc.… En ce sens le cognitivisme se rapproche en fait (en apparence) du Nominalisme, du Positivisme Logique et du Cercle de Vienne où tout est considéré comme pouvant se ramener à des manipulations de symboles, comme avec les propositions logiques de Wittgenstein.

Le connexionnisme, comme vu plus haut en (IV-5), envisage la cognition comme le résultat d'une interaction d’un grand nombre de parties élémentaires d'un réseau avec établissement de nouvelles connexions (synapses) dans ce réseau. Ces nouvelles connexions, nouveaux schémas de relations entre neurones, transposent dans le cerveau la perception du monde réel. Ce réseau de connexions joue le rôle d’un programme et effectue un certain nombre de « calculs » ou plus exactement de « computations » pour lesquels il a été conçu par le chercheur. Ces deux approchent s’opposent par nature au gestaltisme vu en (II-2-1) car celui-ci va s’intéresser d’emblée à une approche globale, à une Forme au sens aristotélicien, à l’organisation, de la chose étudiée. En cela il est donc radicalement opposé au connexionnisme et au cognitivisme intrinsèquement cartésiens et positivistes car implicitement simples et non complexes.

Apport de la Systémique : Il y a quelque fois une confusion dénoncée par JL Le Moigne entre autres entre le connexionnisme vu comme s’opposant à la Systémique par une mise en avant des phénomènes de réseaux connexionnistes, contre les systèmes implicitement pensés comme strictement hiérarchiques. Comme expliqué en (II-4-2), un système peut être organisé en hiérarchique simple, en réseau, ou en multi-hiérarchique (réseau hiérarchique). La Systémique prend en compte la capacité d’une telle organisation à se réorganiser, notamment mais pas seulement comme décrit par le connexionnisme. La Systémique en première approche semble donc plutôt proche du connexionnisme qui semble bien se rattacher aux courants holistiques. Cependant, la Systémique étudie clairement les flux d’informations, allant vers ou venant de l’extérieur ou encore internes aux systèmes. Il ne prétend pas qu’un seul type de système -comme le fait le connexionnisme- puisse traiter le monde extérieur. La Systémique reconnaît tous les types de systèmes (y compris ceux qualifiables de « computationnels ») soit au niveau du système principal de pilotage, soit au niveau des sous-systèmes avec son propre pilotage. Enfin la Systémique va plus loin avec le concept utilisé par le Constructivisme également et déjà évoqué de nombreuses fois ici d’Eco-Auto-Ré-organisation. 

 SUITE du Blog : V-11) Internalisme versus Externalisme

Benjamin de Mesnard
Épistémologie Systémique Constructivisme  

vendredi 1 mai 2009

IV) Théories opposées à la Systémique (IV-3 R. Thom et IV-4 A. Comte)

IV-3) René Thom et le néo-platonisme

René Thom a plus récemment repris et modernisé les concepts de Formes en soutenant, comme Platon, que celles-ci ne pouvaient appartenir qu’à un monde séparé du nôtre. En employant de nombreux exemples, comme ceux donnés par des formes animales identiques au cours des âges géologiques et de l’évolution, il montre que les mêmes formes d’animaux peuvent revenir. Il a bien montré les phénomènes bien réels de bifurcations où un organisme quelconque peut évoluer vers plusieurs voies différentes puis séparées, l’une d’elles étant « choisie » éventuellement à l’issue d’une suite d’événements fortuits. Cette voie « choisie » -ou sélectionnée- donnera alors lieu à une Forme précise qui pourra être suffisamment stable pour durer des millénaires. Par beaucoup de points ce qui a été explicité par René Thom est réutilisable directement par la Systémique, tout comme le réductionnisme, en tant que outil intermédiaire, une étape. Ainsi c’est le cas de la théorie des bifurcations qui permet d’achever de réintégrer l’évolution des Formes –alias structures- que le structuralisme avait tellement eu de mal à traiter. Par contre, par ses positions affichant la nécessité selon lui de « ranger les Formes dans un monde séparé des Idées » (dixit), sous prétexte de la répétition de ces Formes au cours du temps, le met définitivement du côté des (néo) platoniciens.
Cependant, la « théorie des catastrophes » de R. Thom est des plus intéressantes. Elle semble apporter en effet une proposition de solution à la problématique de l’évolution des formes/ structures/ systèmes vues d’un côté comme trop stables et devant pourtant donner lieu à de nouvelles formes/ structures/ systèmes par la suite. Cette théorie explique qu’il y a bien des phases de stabilité, entrecoupées de transitions de phases. Des cassures vont se produire, sur la base d’évènements fortuits, certains disparaissant sans laisser de trace, d’autres se figeant en étant déterminant pour la forme future.

IV-4) Auguste Comte et le Positivisme

A. Comte refuse le fait qu’il puisse exister des connaissances à priori, les sciences ne pouvant se faire que sur des observations de la réalité étudiée. C’est une forme de rationalisme poussé à son extrême, voire idéologique, doublé d’un déterminisme absolu, la science étant mesure de toutes choses, devra remplacer à terme les religions. A. Comte y ajoute une vision mécaniste, où tout phénomène peut se ramener à des lois naturelles invariables simples, c’est le réductionnisme positif. Sont bien sûr rejetés les causes premières ou causes finales aristotéliciennes. Enfin, le Positivisme affirme pouvoir atteindre les Vraies Lois de la Nature grâce à la Science, découvrir le Vérité avec un grand "V". On parle alors en matière d’expérimentation scientifique de « vérificationnisme » : si une expérimentation sur une prédiction d’une théorie est vérifiée par l’expérience, alors la théorie est dite vérifiée c’est à dire Vraie et il est inutile de faire d’autres expériences. Cette croyance est encore très répandue dans la grand public aujourd’hui. On peut même voir des raisonnements sur ce point complètement à l’inverse du raisonnement adéquat, c’est à dire Poppérien. Alors que pour Popper il suffit d’une expérience (sérieuse et valide car approuvée au sein de la communauté scientifique) invalidant la théorie pour rejeter la théorie, pour les Positivistes c’est l’inverse : si une expérience ne corresponds pas à la théorie, il faut recommencer une autre expérience, si celle-ci est conforme avec la théorie, la théorie est alors validée. C’est le cas par exemple pour l’Homéopathie : « Et, au risque de choquer certains, on peut signaler ici la mémoire de l’eau » : qu’on l’accepte ou non, on doit scientifiquement admettre qu’un jour ou l’autre l’homéopathie sera infirmée ou confirmée. Dans le second cas, ce serait évidemment une magnifique « révolution scientifique » [MOUCHOT Claude, « Méthodologie, Scientificité et Sciences Sociales », Recherche en Soins Infirmiers n° 50, p 28]. Alors que l’Homéopathie a déjà été mainte fois invalidée expérimentalement et donc réfutée ! Ici ce « penseur » considère que si l’Homéopathie n’a pas encore été confirmée (car en l’occurrence elle a été bel et bien réfutée !) , elle le sera peut-être demain par une Nième expérimentation et ce sera alors une confirmation, une vérification définitive de cette « science ». On voit donc bien l’opposition radicale avec Aristote mais également la Systémique et la forte parenté avec Descartes (et le Marxisme comme on va le voir). K. Popper a tenté de corriger le Positivisme par le Positivisme Logique avant de rejeter les deux. Aujourd’hui le Positivisme de A. Comte est qualifié de Scientisme. Enfin J.L. Le Moigne dans ses différentes œuvres sur le Constructivisme attaque vigoureusement le Positivisme, notamment pour son impact sur l’organisation de l’enseignement, en particulier l’enseignement supérieur, qui tend à donner la priorité absolue aux sciences dites dures (mathématiques, physique, chimie,…) et à considérer les autres domaines (sociologie, psychologie,…) comme secondaires ou même inférieures, même si -comme l'a montré K. Popper- elles ne sont pas des sciences au sens strict puisque non réfutable. A. Comte est allé très loin dans ces positions puisqu'il a été jusqu'à vouloir faire de la science une religion... On est alors très loin de la prudence/phronésis de Vico et Aristote, du juste milieu, de la modestie et de la Rationalité limitée !

SUITE du Blog : Théories opposées à la Systémique (Dialectique)

Benjamin de Mesnard