samedi 6 avril 2019

IV) Théories opposées à la Systémique (IV-6 Marxisme)

IV-6) Marxisme (Marx, Engels, Lénine, Staline…)

Le Marxisme s’est posé depuis l’origine comme étant à la fois scientifique et philosophique, muni d’une nouvelle logique, le matérialisme dialectique  (voir IV-5). Il se veut nouveau paradigme d’une  science économique refondée, à même de surpasser définitivement la « science économique bourgeoise ». Le terme « matérialisme dialectique » n’apparaîtra qu’après Marx, avec Engels et Lénine et sera érigé en totem idéologique par Staline. 
Pour analyser le Marxisme, il faut revenir aux sources : « Le Capital » T1,2 et 3, « Contribution à la critique de l’économie politique », ou « Le Manifeste du Parti Communiste » de Marx.
Le Marxisme repose sur une nouvelle vision de l’économie, et surtout sur une analyse de la valeur - pierre angulaire du Marxisme - que Marx différencie en « valeur d’usage », « valeur d’échange » pour finir par évoquer les prix.
Remarque préalable : Il faut tout d’abord souligner qu’en cherchant dans tous les textes cités plus haut, il est difficile de trouver un passage donnant une démonstration claire et stable de la « valeur d’usage » et il est impossible d’en trouver une de la « valeur d’échange ». Même si Marx revient souvent sur la « valeur d’usage », on comprend bien que c’est pour répéter que « valeur d’usage » = « nombre d’heures de travail indifférencié de l’ouvrier moyen », notion vitale au Marxisme. La « valeur d’échange » revient aussi de temps en temps, mais soit elle est utilisée pêle-mêle avec la « valeur d’usage » comme dans « Contribution... » ce qui a pour effet de brouiller les pistes, soit elle est habilement discréditée par le terme « aliénation », ou bien mise de côté via quelques glissements sémantiques. Ainsi c’est le cas dans « Le Capital » comme on va le voir ci-dessous. Ici aussi on voit bien que la « valeur d’échange » ne convenant pas du tout à l’édifice idéologique édifié par Marx, cette notion doit être éradiquée. 

IV-6-1) La « valeur d’usage » chez Marx : pour Marx, il le répète souvent, la « valeur d’usage » est proportionnelle au nombre d’heures de travail de l’ouvrier moyen, ainsi dans « Le Capital » T1 p 44 : « C'est donc seulement la quantité de travail socialement nécessaire ou le temps de travail socialement nécessaire à la fabrication d'une valeur d'usage qui détermine la grandeur de sa valeur. La marchandise singulière ne vaut ici tout bonnement que comme échantillon moyen de son espèce. Les marchandises qui contiennent des quantités de travail égales, ou qui peuvent être fabriquées dans le même temps de travail, ont donc la même grandeur de valeur. Le rapport de la valeur d'une marchandise à la valeur de n'importe quelle autre marchandise est donc celui du temps de travail nécessaire pour produire l'une au temps de travail nécessaire pour produire l'autre. En tant que valeurs, toutes les marchandises ne sont que des mesures déterminées de temps de travail coagulé ». 
Deux choses à noter : 
a) glissement de « valeur d’usage » à « valeur » tout court à plusieurs reprises… 
b) on est dans l’affirmation, on ne trouve pas de démonstration dans tous ces textes, en dépit du « C’est donc... » du début du passage ici... 
Or, en langage économique, la « valeur d’usage » de Marx s’appelle en réalité un coût partiel, partiel car se limitant au coût salarial de l’ouvrier moyen et ne prenant pas en compte les autres coûts : autres salariés, conception/ingénierie, locaux, machines, impôts, transports, distribution, défauts de fabrication, vente, etc. etc.. Attribuer, via un artifice de dénomination le mot de « valeur d’usage » à un coût d’ailleurs partiel, c’est soit une erreur de débutant, soit une grossière tromperie. Cet extrait serait correct en remplaçant le terme « valeur d’usage » par « coût salarial de l’ouvrier moyen »…. mais cela reviens à dire une tautologie qui n’apporte rien car déjà bien connue avant Marx ! Exemple d'un tel remplacement : « Les marchandises qui contiennent des quantités de travail égales, ou qui peuvent être fabriquées dans le même temps de travail, ont donc la même grandeur de valeur  coût salarial de l’ouvrier moyen. Le rapport de la valeur du coût salarial de l’ouvrier moyen d'une marchandise à la valeur au coût salarial de l’ouvrier moyen de n'importe quelle autre marchandise est donc celui du temps de travail nécessaire pour produire l'une au temps de travail nécessaire pour produire l'autre.».
Par ailleurs, avec cette « définition » de la valeur, un ouvrier peut bien passer 1 million d’heure de travail sur un bien qui n’intéresse aucun acheteur, ce bien aura un coût de production énorme mais n’aura aucune valeur (ni d’usage ni d’échange) et ne vaudra rien. D’autre part, ce « concept » ignore le degré d’automatisation et de robotisation dans la production. Aujourd’hui il existe des usines presque sans ouvrier avec un temps de travail de « l’ouvrier moyen » proche de zéro, selon Marx faudrait-il en conclure que la valeur (ou « valeur d’usage ») des biens produits par cette usine sont nuls ? Pourtant Marx avait conscience que l’automatisation pouvait se développer, mais n’en tire aucune conséquence, ex : « Après l'introduction du métier à tisser à vapeur, en Angleterre, il ne fallait plus peut être que la moitié du travail qu'il fallait auparavant pour transformer une quantité de fil donnée en tissu. (…) C'est donc seulement la quantité de travail socialement nécessaire ou le temps de travail socialement nécessaire à la fabrication d'une valeur d'usage qui détermine la grandeur de sa valeur. ». [Marx « Le Capital », T1, p 43]. Enfin, ce que l’on entend quelque fois en économie par « valeur d’usage », c’est la valeur psychologique attribuée par celui qui va utiliser le bien acquis. Cette « valeur d’usage » est donc relative à chaque individu et elle est subjective. La vraie « valeur d’usage » d’une voiture par exemple est très élevée pour quelqu’un vivant en milieu rural sans aucun transports en commun, car elle sera un moyen de transport vital. La même voiture pour un parisien aura une « valeur d’usage » faible car il n’en a pas besoin la plupart du temps pour vivre et travailler. Cela n’a donc rien à voir avec le coût salarial d’un ouvrier moyen comme le croit Marx… 

IV-6-2) La « valeur d’échange » chez Marx : par ailleurs il parle de « valeur d’échange », or la seule « valeur d’échange » réelle, c’est celle attribuée par celui qui achète le bien (ou le service) d’un côté et par celui qui le vends. La « valeur d’échange » est donc non seulement relative aux deux acteurs de l’échange, mais elle même subjective à chacun d’entre eux. Cette véritable valeur d’échange, différente entre vendeur et acheteur n’est pas le prix comme le croit Marx, on n’y reviendra. Comme on voit bien que la « valeur d’échange » pose un problème car elle relève des libres marchés haïs, et qu’une seule « valeur » doit s’imposer, celle définie par Marx ; il a recours à diverses méthodes pour la discréditer, dont un peu de dialectique avec la « non-valeur » négation de la valeur : « La première façon, pour un objet d'usage, d'être une valeur d'échange en puissance, c'est d'exister comme non-valeur d'usage, c'est-à-dire comme quantité de valeur d'usage excédant les besoins immédiats de son possesseur. Les choses sont par définition extérieures à l'homme, et donc aliénables. Pour que cette aliénation soit réciproque, il suffit que les hommes se fassent implicitement face comme les propriétaires privés de ces choses aliénables et par là même précisément comme des personnes indépendantes les unes des autres ». [Marx « Le Capital », T1, p 100]. En résumé, avec la « valeur d’échange » on est dans la non-valeur, dans l’aliénation, aux mains de propriétaires privés indépendants les uns des autres individus dans la solitude de l’aliénation...

IV-6-3) Glissements sémantiques répétés : D’autre part la « valeur d’échange » qu’il déclare vouloir étudier, semble au fil du texte être décrétée anecdotique, « forme phénoménale », et est mise aux oubliettes sans bruit via quelques glissements sémantiques…
Par exemple dans [Marx « Le Capital », T1, p 43] : « Si l 'on fait maintenant réellement abstraction de la valeur d'usage des produits du travail, on obtient leur valeur, telle qu'elle avait précisément été déterminée. ». Note : devant le lecteur peu attentif, il opère ici un 1° glissement sémantique de « valeur d’usage » vers « valeur » tout court. Il le fait maintes fois, comme dans l’extrait vu plus haut en (IV-6-1) T1 p 44 et cette « technique » se répète encore et encore dans tous ces écrits. Il continue, cette fois-ci avec la « valeur d’échange » :  : « Ce qu'il y a donc de commun, qui s'expose dans le rapport d'échange ou dans la valeur d’échange de la marchandise, c'est sa valeur. ». Ibid p 43. Note : c’est le 2° glissement sémantique de « valeur ou rapport d’échange » vers « valeur » tout court, qui va permette l’élimination de la « valeur d’échange ».
Puis : « (…) Toute la suite de notre recherche nous ramènera à la valeur d'échange comme mode d'expression ou comme forme phénoménale nécessaire de la valeur, laquelle doit cependant être d'abord examinée indépendamment de cette forme. ». Ibid p 43. Dernière phase de l’élimination : la « valeur d’échange » devenant tout à coup un simple « forme phénoménale », il faut donc l’« examiner indépendamment de cette forme », elle est donc éliminée discrètement. Et dès la phrase suivante on repart ainsi sur : « Une valeur d'usage, une denrée, n'a donc une valeur que parce qu'en elle est objectivé ou matérialisé du travail humain abstrait. Comment alors mesurer la grandeur de sa valeur ? Par le quantum de "substance constitutive de valeur" qu'elle contient, par le quantum de travail. » etc.  Tout au long du T1, Marx tente d’enterrer la « valeur d’ échange » qui ne convient pas à sa théorie. Cela le cas échéant au prix de phrases peu compréhensibles comme en p 217 : « Mais le travail passé que contient la force de travail et le travail vivant qu'elle peut fournir, autrement dit le coût journalier de son entretien et sa dépense journalière sont deux grandeurs tout à fait différentes. La première détermine sa valeur d'échange, l'autre constitue sa valeur d 'usage. (…) Quant au vendeur de la force de travail, comme le vendeur de n'importe quelle autre marchandise, il réalise effectivement sa valeur d'échange et aliène sa valeur d'usage. » où il en profite pour glisser à nouveau le mot clé « aliénation »… Avec un large recours aux « valeur » tout court, le but est de mettre dans la tête du lecteur que « valeur d’échange » = « valeur d’usage » = « valeur » tout court = « nombre de jours de travail de l’ouvrier moyen» , comme seule valeur existante. Cela est effet vital car tout le Marxisme repose sur cela, c’est le seul moyen pour parvenir à « démontrer » l’exploitation de l’ouvrier par le capitaliste via la notion de « surproduit » par du « surtravail » (autre glissement sémantique) puisque la seule « valeur » c’est le nombre d’heures de travail de l’ouvrier moyen.
Pour Marx la journée de travail d’un ouvrier se décompose en deux parties : la première permet juste la production nécessaire pour payer un salaire de survie à l’ouvrier. La seconde donne un « surproduit » générant une « survaleur » qui constituera le profit allant dans la poche du capitaliste, via un « surtravail » « extorqué » à l’ouvrier. Ex : « La seconde période du procès de travail, pendant laquelle l'ouvrier trime au-delà des limites du travail nécessaire, lui coûte certes du travail, une dépense de force de travail, mais ne constitue pas de valeur pour lui. Elle forme une survaleur qui sourit au capitaliste de tous les charmes d'une création ex nihilo. Cette partie de la journée de travail, je l'appelle temps de travail en surplus, et le travail dépensé pendant ce temps, surtravail (surplus labour). Autant il est décisif pour la connaissance de la valeur en général de la saisir comme pure coagulation de temps de travail, comme pur travail objectivé, autant il est décisif de saisir la survaleur comme pure coagulation de temps de travail en surplus, comme pur surtravail objectivé. Seule la forme sous laquelle ce surtravail est extorqué au producteur immédiat, l'ouvrier, distingue les formations sociales économiques, par exemple la société esclavagiste de celle du travail salarié. ». [Marx « Le Capital », T1, p 242]. Note : Marx en profite pour glisser le terme « esclavagiste » en parlant du capitaliste… On arrive alors au supposé mal majeur du capitalisme à travers l’une de ses « contradictions » : la surproduction d’un côté et une sous-consommation de l’autre, les ouvriers étant tout juste maintenus en régime de survie. C’est l’une des contradictions principales du capitalisme selon Marx, alors même que l’histoire a montré que la supposée « surproduction » n’existe pas à moyen terme car – précisément – l’ouvrier s’est mis à son tour à consommer au cours d’une augmentation générale du niveau de vie. S’il y a surproduction (et donc insuffisance de la demande pour ces produits là, ou à l’inverse, excès de demande), elle ne peut être que temporaire, le système se rééquilibrant via un processus d’équilibre dynamique ponctué d’éco-auto-ré-organisation ! Ce qui est vue comme mauvais, exploitation, surtravail extorqué et surproduction par Marx est en réalité le moyen le plus sûr d’élever le niveau de vie de la population en produisant progressivement plus de biens et de services qui seront consommés via un rebouclage rétroactif typiquement Systémique. Mais cela Marx, en tant que scientiste positiviste, n’en n’a visiblement pas conscience.

IV-6-4) De même il y a confusion entre prix et « valeur d’échange » : Le prix, c’est le point de rencontre possible (mais non obligatoire !) à un certain moment entre l’acheteur et le vendeur entrés en relation. C’est le prix sur lequel il vont tomber librement d’accord (ou non, et dans ce cas l’échange ne se fait pas) pour procéder librement à l’échange. Cet accord sur un prix se déroule dans un environnement limité, depuis des horizons de connaissances, des points de vues différents et limités du vendeur et de l’acheteur. Ils agissent avec une information et une rationalité limitées, c’est la Rationalité limitée comme vu avec H. Simon, voir (II-5-5-e). De plus, comme souligné par K. Popper et F. Hayek simultanément, et avec les travaux sur la Théorie des Jeux de J. Von Neumann , O. Morgenstern et J. Nash, il faut tenir compte du jeux des acteurs économiques entre eux, adaptant en permanence leurs actions et choix en fonction de ce qu’ils croient savoir de ceux des autres. Cela donne lieu à une Dialogique continue entre les acteurs économiques, une coopétition, mélange de compétition et de coopération et non une Dialectique se résumant à des guerres ou luttes permanentes, voir (V-16). Tout cela est totalement inconnu du Marxisme.
Par ailleurs les prix affichés par les vendeurs, constituent un flux d’information au sien du Système économique. Au même titre que les autres types de flux de matières, énergies, etc. Marx confond « valeur d’échange » et prix : « On dit : ce stylo vaut Fr 10 parce que c'est le prix affiché, et nous confondons dans notre langage courant le prix et la valeur. Mais si j'ai acheté ce stylo, c'est bien parce que pour moi, ce stylo vaut plus que Fr 10. Si pour moi, avoir Fr 10 ou avoir ce stylo, c'était exactement la même chose, alors je n'aurais pas pris la peine de l'acheter. Inversement, pour le marchand, le stylo vaut moins que mes Fr 10, sinon il ne le mettrait pas en vente, ou pas à ce prix là. S'il vend le stylo, c'est parce qu'il pense pouvoir faire plus de choses avec mes Fr 10 qu'avec ce stylo sur son rayon. » [MICHEL, Henry, « Peux-t-on faire des Affaires sans se salir des Mains ? », Conférence donnée à Genève, le 2/11/1993, p 7]. On note également dans cette citation que l’échange est inégal est que cela est nécessaire. Les Marxistes soutiennent qu’avec le système capitaliste, le fait que les échanges soient inégaux est scandaleux, preuve que ce système est vicieux car les échanges ne peuvent se faire selon eux qu’à la « valeur d’usage » égales. Mais comme le dit encore Henry Michel : « Donc quand j'ai acheté le stylo, nous avons gagné tous les deux et nous avons gagné parce que les termes de l'échange étaient inégaux. C'est cela, la réalité, pourtant elle n'est pas reflétée dans la comptabilité. » [Ibid p 7]. C’est parce que l’échange est inégal, que chacun y gagne, sinon il n’y aurait pas eu cet échange, puisque - contrairement aux services étatiques en vente forcée via l’impôt- l’acheteur était libre d’acheter ou non ce stylo au prix de Fr. 10. Pourquoi pour Marx un échange doit-il être nécessairement égal ? A cause de la « valeur » ramenée au nombre d’heure de travail d’un ouvrier moyen. Si lors d’un échange l’acheteur paye 110 alors que la « valeur » marxiste est de 100, c’est qu’il y a vol, « survaleur », surexploitation par le capitaliste qui écrase le prolétariat, non seulement via du « surtravail », mais également en essayant de vendre 110 ce qui a une « valeur d’usage » Marxiste de 100…

IV-6-5 ) A travers cette analyse, on comprend pourquoi Marx est à l’opposé de la Systémique, d’une manière que l’on pourrait presque qualifier de caricaturale :

a) Matérialisme :
Bien que se référant à deux philosophes idéalistes : Descartes et Hegel. Comme vu au chapitre IV, matérialisme et idéalisme s’opposent tout en faisant appel l’un à l’autre. et sont tous deux incompatibles avec la Systémique pour qui Matière et Forme sont inséparables, un Système formant un tout sans avoir une Forme/Structure/Organisation d’un côté et de la Matière de l’autre...

b) Démarche de pseudo-science non scientifique
C’est à dire une démarche, tout comme l’astrologie par exemple, qui veut se draper des oripeaux de la science sans en être du tout :
  - revendication répétée d’être scientifique, mais une chose fausse ne devient pas vraie parce que martelée encore et encore,
  - recours à la pseudo logique qu’est la Dialectique comme vu en (IV-5),
  - recours à des pseudo formules mathématiques telles que M-A-M’-A’ où A’=A+A, ou bien M’-A’=(M+m)-(A+a) dans « Le Capital » avec des exemples numériques repris des dizaines de fois, toujours selon le système de la répétition.
Tout cela ne fait pas une théorie scientifique, voir K. Popper (III-2-8), ainsi on ne voit pas comment le Marxisme peut se prêter à des tests, des expérimentations, afin d’être éventuellement réfuté le cas échéant : il est irréfutable comme l’est l’astrologie. D’ailleurs, l’histoire qui a suivi, a démontré mainte fois l’échec du Marxisme, sans que cela affecte ses fidèles dans leur foi, à la manière d’une religion...

c) Recours à un réductionnisme outrancier comme « l’ouvrier moyen », en faisant également la moyenne des machines de production (ignorant ainsi leurs diversités, leurs modernisations et les augmentations de productivité en découlant) et la moyenne des marchandisent produites afin de gommer leurs différences, leurs complexités, avec des machines plus ou moins automatisées et des marchandises (ou des services !) très variés. Il prends donc en considération une entreprise type moyenne simplifiée, caricaturale typiquement cartésienne. C’est en quelque sorte une entreprise rêvée ayant 1 machine, 1 ouvrier et 1 marchandise produite avec 1 valeur et 1 prix… et 1 capitaliste bien entendu. Cela lui permet « d’éjecter » de son analyse toute la diversité et la complexité des actions et interactions individuelles, des innovations, de la diversités des modes de productions, des marchandises ou services produits et des compétences très variées requises. Ainsi dans son modèle cartésien ultra simplifié, les ouvriers, techniciens, ingénieurs, managers, gestionnaires, commerciaux etc. d’une entreprise sont réduits à être des robots moyens uniformisés tout juste capable de faire un travail simple. C’est l’hypostase de « l’Ouvrier » noté « T », du « Capital » noté « C », de la « Marchandise »  notée « M » dans ses « équations » pseudo mathématiques : « on donne des majuscules à des mots vides de signification » comme le disait Simone Weil en 1937 [WEIL, Simone, Œuvres, Ed. Quarto Gallimard, p 473]. C’est la négation des êtres humains avec tous leurs talents et diversités comme l’explique Marx lui-même : « Pour bien comprendre comment la valeur d'échange est déterminée par le temps de travail, il importe de ne pas perdre de vue les idées essentielles suivantes. La réduction du travail à du travail simple, pour ainsi dire dénué de qualité ; (…). Pour mesurer les valeurs d'échange des marchandises au temps de travail qu'elles contiennent, il faut que les différents travaux eux-mêmes soient réduits à un travail non différencié, uniforme, simple, bref à un travail qui soit qualitativement le même et ne se différencie donc que quantitativement. Cette réduction apparaît comme une abstraction, mais c'est une abstraction qui s'accomplit journellement dans le procès de production social. (...) En fait, le travail, qui est ainsi mesuré par le temps, n'apparaît pas comme le travail d'individus différents, mais les différents individus qui travaillent apparaissent bien plutôt comme de simples organes du travail. Autrement dit, le travail, tel qu'il se présente dans les valeurs d'échange, pourrait être qualifié de travail humain général. Cette abstraction du travail humain général existe dans le travail moyen que peut accomplir tout individu moyen d'une société donnée, c'est une dépense productive déterminée de muscle, de nerf, de cerveau, etc., humains. C'est du travail simple, auquel peut être dressé tout individu moyen, et qu'il lui faut accomplir sous une forme ou sous une autre. » [Marx, « Contribution... », Chap 1, p 19]. En passant, on note ici que subrepticement Marx mélange à nouveau « valeur d’échange » et « valeur d’usage » : il affirme que c’est la « valeur d’échange » (et non plus seulement la « valeur d’usage ») qui est « déterminée par le temps de travail » de l’ouvrier moyen ! Par ailleurs, on aura bien compris que Marx considère les divers salariés d’une entreprise comme de « simples organes de travail » tout juste capables de faire « du travail simple auquel peut être dressé tout individu moyen »... car cette réduction des salariés au niveau de « simples organes de travail » d’ouvriers moyens est nécessaire à sa théorie. De ce « modèle » il en tirera des centaines de pages d’analyses de tous ordres, de grandes généralisations notamment sur le destin historiciste lyrique de la Classe ouvrière. On est vraiment loin de la phronésis / prudence d’Aristote et J.B. Vico concernant les conclusions à tirer des modèles -surtout poussé à ce degré de simplification- , et également loin de la « carte n’est pas le territoire » de A. Korzybski : le modèle ultra simplifié de Marx est pris comme réalité alors qu’il ne corresponds aucunement au monde réel.

d) Théories / modèles irréfutables et donc non-scientifiques, voir (III-2-8)
Comme on l’a vu en (b), le Marxisme est intrinsèquement irréfutable, il ne peut pas être testé, soumis à une expérimentation, à l’instar de l’astrologie par exemple. De plus il y a toujours une réponse ad-hoc pour toutes remarques et critiques, tout comme l’astrologie encore. Par exemple, face à la faillite, au totalitarisme et aux exactions de tous les régimes Marxistes, on aura l’explication ad-hoc « ce n’était pas vraiment du communisme » mettant définitivement le Marxisme à l’abri de toute réfutation. Pour mieux se protéger, la technique de Marx consistant à user de moyennes et de simplifications sur tous les sujets est un outils commode pour annuler ou nier (dialectiquement ?) toutes les remarques déstabilisatrices qu’il connaît bien de la part de ses contradicteurs. Ainsi, comme vu ci-dessus, si certaines machines à tisser sont mues désormais par la vapeur et réduisent pas deux le temps de travail des ouvriers, cela ne change rien puisque l’on va considérer une machine moyenne. Si un ouvrier est paresseux et met dix fois plus de temps à produire la même marchandise, celle-ci (si on applique sa théorie) vaudra  dix fois plus, mais, en fait, on ne prends que le temps moyen de « travail simple » des ouvriers « simples organes », idem sur toutes les marchandises même si elles sont radicalement différentes. Enfin, en dernier ressort, ses détracteurs, pour faire bonne mesure, sont régulièrement qualifiés de bourgeois, de libéraux, dénigrés et insultés, mais sans aucune argumentation, ainsi : « Note 10. A cette troisième loi, Mac Culloch, entre autres, a ajouté cet additif inepte que la survaleur peut s'élever sans chute de la valeur de la force de travail si l 'on supprime certains impôts que le capitaliste devait payer auparavant. (...) L'exception de Mac Culloch prouve donc simplement qu'il n'a rien compris à la règle, malheur qui lui arrive souvent, quand il vulgarise Ricardo, aussi souvent qu'à J.B. Say, quand il vulgarisait Adam Smith. » [Marx, « Le Capital » T1, p 584].

e) Méconnaissance des boucles rétroactives des équilibres dynamiques ponctués (homéostasie) de la Systémique :
       • Avec sa théorie de la valeur, Marx ignore la moitié des circuits du système économique. Pour lui il n’y a qu’à produire une marchandise, qui a automatiquement comme valeur la « valeur d’usage » égale au coût du salaire de l’ouvrier, nécessairement égale à la « valeur d’échange », impérativement égale au prix de mise en vente (sinon le capitaliste est un voleur en plus d’un exploiteur comme vu plus haut en (IV-6-4) . A partir de là, cette marchandise trouvera son client à ce prix là tout aussi automatiquement ! Tout le côté consommateurs et consommation est totalement ignoré, les « lois » de l’offre et de la demande n’existent pas, pas besoin de commerciaux ou de vendeurs et encore moins de marketing opérationnel ni d’associations de consommateurs. On comprend alors pourquoi les industries communistes ont toujours été en retard technique, non innovantes, produisant trop ou trop peu des marchandises ne répondant pas aux besoins de la population, avec des Trabants au lieu des voitures fiables, variées et confortables des pays « capitalistes »…
       • De plus, avec sa théorie de la surproduction permanente s’amplifiant fatalement comme vu en (IV-8-3), il ignore l’adaptation en équilibre dynamique ponctuée (l’homéostasie) des acteurs, l’éco-auto-ré-organisation, systémique. Pour lui, il n’y aura jamais aucun rééquilibrage Systémique possible de cette surproduction par un développement de la demande par exemple.
      • De même, il affirme que le maintien des salaires des ouvriers juste au niveau de la survie génère un surplus permanent de main-d’œuvre, d’ouvrier sans travail ce qui renforce les salaires au niveau de survie. Or, il faut tenir compte des effets de rebouclages systémiques. Les employeurs ont donc à leur disposition une masse d’ouvriers à bas coûts dans un monde où seul compte le fait de produire, puisque les marchandises produites trouvent automatiquement acquéreur au prix de la « valeur d’usage » de Marx, valeur indépendante de l’offre et de la demande. Ils n’ont donc aucune raison de ne pas embaucher massivement cette masse d’ouvriers pas chers et disponibles immédiatement pour augmenter leur production et leurs profits, jusqu’à la réduction à zéro du chômage. Cette disparition du chômage, selon la « loi » de l’offre et de la demande (typiquement Systémique) qu’ignore Marx, va alors créer des tensions sur les salaires, les capitalistes entrants en compétition entre eux pour débaucher avec de meilleurs salaires les meilleurs ouvriers chez leurs concurrents… Et donc le revenu des ouvriers va augmenter et leur niveau de vie avec, phénomène effectivement observé au cours de l’histoire. Mais encore faut-il imaginer des ouvriers autres que « l’ouvrier moyen », « simples organes de travail » tout juste capable de faire « du travail simple auquel peut être dressé tout individu moyen » ! C’est ce que remarque K. Popper : « Or, Marx n’indique pas pour quelle raison la main-d’œuvre disponible continuerait à dépasser la demande. Car, si l’exploitation des travailleurs procure un si grand profit, pourquoi les capitalistes ne cherchent-ils pas à employer un nombre toujours plus grand d’ouvriers ? La concurrence entre employeurs ferait alors monter les salaires et l’exploitation se réduirait et disparaîtrait. » [POPPER, Karl, « La Société Ouverte… » T2, p 117].
     • Enfin, même chose avec la baisse tendancielle du taux de profit des capitaliste soutenue par Marx. «  Le capital d’un industriel se divise en deux parts : l’une qui sert aux investissements (en terrain, outillages, matières premières, etc.), et l’autre au paiement des salaires. Marx appelle la première « capital constant », la seconde « capital variable ». Ces termes me paraissant un peu imprécis, je les remplacerai par « capital immobilisé » et « capital-salaires ». Selon Marx, le capitaliste ne peut tirer profit que de l’exploitation des ouvriers, c’est à dire de l’emploi du « capital-salaires », le « capital immobilisé » étant, en quelque sorte, un poids mort que la concurrence et la tendance générale à l’augmentation de la production l’obligent à croître sans cesse. Son importance par rapport au « capital-salaires » grandissant, le taux de profit du capital total doit nécessairement diminuer. » [POPPER, Karl, « La Société Ouverte… » T2, p 122]. Or, dans le monde réel, le « capital immobilisé » est productif, comme le montre les usines modernes sans ouvriers et peuplées de robots. Ce « capital immobilisé » est de plus en plus productif d’ailleurs grâce aux innovations, à la recherche et au progrès techniques, (eux-même issus d’une autre boucle de rétroaction positive systémique, les innovations appelant les innovations)... totalement ignoré par Marx. Ici également, après avoir ignoré la moitié du système économique avec le marché, la demande, voilà qu’il ignore maintenant la productivité du sous-système constitué par le « capital immobilisé » !

f) Non prise en compte des facteurs de risques pris par les capitalistes et de la sélection naturelle qui en découle sur les entreprises : Comme on la vu en (III-2-6) avec Darwin, la sélection naturelle est un concept inhérent à la Systémique. Or Marx grâce on sa « valeur d’usage » = « valeur d’échange » = prix = « nombre d’heure de travail d’un ouvrier moyen » aboutissant à des produits ayant une valeur prédéterminées, et trouvant acheteurs automatiquement à cette valeur, tous facteurs de risques pris par le capitaliste sont purement et simplement niés. En somme avec Marx, le capitaliste est un profiteur jouant et gagnant à coup sûr sur le dos des ouvriers. Toutes les idées, l’argent investit (peut-être bien en pure perte), les innovations, les concurrents, le travail pour trouver de nouveaux débouchés et les risques de ruines pris par l’entrepreneur sont ignorés. Ainsi il est facile à Marx de transformer l’entrepreneur et ses investisseurs en capitalistes profiteurs surexploitant sans risques ni justification les ouvriers… pourtant jugés par Marx lui-même comme n’étant que de « simples organes du travail » !

g) Le Marxisme est un oxymore qui se veut une science et une philosophie : 
 
A titre d’exemple Staline écrit en 1938 : « Marx et Engels n’ont en effet emprunté au matérialisme de Feuerbach que son « noyau central » ; ils l’ont développé en une théorie philosophique scientifique du matérialisme, et ils en ont rejeté toutes les superpositions idéalistes, éthiques et religieuses. » [STALINE, J.V., Matérialisme dialectique et Matérialisme historique, p 2, 1938]. C’est une contradiction, chose ironique alors même que la dialectique se veut théorie des contradictions et des oppositions avec la « négation de la négation » … En effet, une théorie donnée ne peut être à la fois science et philosophie, il n'y a donc pas de "théorie philosophique scientifique". Comme montré par K. Popper en (III-2-8), une théorie pour être scientifique doit être réfutable, c’est à dire que l’on doit pouvoir la soumettre à des tests, des expérimentations, pour tenter de la réfuter, critère qui n’est pas demandé ni à une théorie philosophique, ni à une religion. 
Le plus surprenant dans cette affirmation de la scientificité du Marxisme, avec une science matérialiste supposée atteindre avec certitude la Vérité, c’est qu’ils accusent de fidéisme ceux qui ne croient pas à l’atteinte de cette Vérité. Ainsi dans le passage déjà cité en (III-2-8) de Lénine repris en 1938 par Staline : « « Le fidéisme contemporain ne répudie nullement la science ; il n'en répudie que les "prétentions excessives", à savoir la prétention de découvrir la vérité objective. S'il existe une vérité objective (comme le pensent les matérialistes), si les sciences de la nature, reflétant le monde extérieur dans l'"expérience" humaine, sont seules capables de nous donner la vérité objective, tout fidéisme doit être absolument rejeté. » (Matérialisme et empiriocriticisme, t. XIII, p.102.). Or précisément ceux qui soutiennent atteindre la Vérité, par un moyen ou un autre, ce sont les religions (et donc les fidéistes), les idéologies ET en particulier les Marxistes ! Preuve s’il en est que le Marxiste est non-scientifique et ne relève que d’un acte de foi… fidéiste.


IV-6-6) Pour terminer, quelques citations du « Manifeste du Parti Communiste » :

a) P 55 : « L’abolition de la famille ! Même les plus radicaux s’indignent de cet infâme dessein des communistes. 
Sur quelle base repose la famille bourgeoise d’à présent ? Sur le capital, le profit individuel. La famille, dans sa plénitude, n’existe que pour la bourgeoisie ; mais elle a pour corollaire la suppression forcée de toute famille pour le prolétaire et la prostitution publique. La famille bourgeoise s’évanouit naturellement avec l’évanouissement de son corollaire, et l’une et l’autre disparaissent avec la disparition du capital. ».
Note : Et les enfants seront embrigadés aux jeunesses communistes, et priés de dénoncer leurs parents le cas échéant… Tout comme cela était le cas chez les Nazis.
b) p 56 : « Mais la bourgeoisie tout entière de s’écrier en chœur : Vous autres, communistes, vous voulez introduire la communauté des femmes ! (…) Les communistes n’ont pas besoin d’introduire la communauté des femmes ; elle a presque toujours existé. (…) Le mariage bourgeois est, en réalité, la communauté des femmes mariées. Tout au plus pourrait-on accuser les communistes de vouloir mettre à la place d’une communauté des femmes hypocritement dissimulée une communauté franche et officielle. ».
Note : La communauté des femmes (réduites à l’état d’objets) est prévue, mais pas celle des hommes...

Misère de la philosophie qui annonce les totalitarismes à venir...

SUITE du blog : IV-7) Comparaison entre Aristote, Leibniz, Structuralisme, Matérialisme Dialectique, Systémique plus Platon, Descartes et Hayek

Benjamin de Mesnard